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Quels préalables valider avant d’animer des analyses de pratiques ?

CODIR animer des analyses de pratiques

Que vous soyez chargé d’animer des analyses de pratiques ou membre d’un CODIR cet article vous prépare à identifier et comprendre les préalables nécessaires à la mise en place et la pérennisation des GAPP.

S’affilier aux différents interlocuteurs avant d’animer des analyses de pratiques

  • Afin de pérenniser le dispositif et d’y apporter du sens, il est primordial de créer un climat de confiance. Dans un premier temps cela peut se faire avec les membres du CODIR. Effectivement, en fonction du climat social au sein de l’établissement, de la défiance ou de l’adhésion envers les analyses de pratique professionnelle, il est plus ou moins aisé pour le CODIR de pouvoir mettre en place des groupes d’Analyse des pratiques. Lorsque c’est possible, il faudra chercher à rencontrer un ou plusieurs membres du CODIR. L’objectif de cette rencontre est de se présenter, de « prendre le pouls » des relations internes, d’interroger sur les attentes. Cela va permettre de créer une alliance tout en explicitant le cadre et les limites de notre intervention. Il est important qu’ils puissent ensuite porter la démarche auprès des salariés. Nous rappelons également qu’aucun membre du CODIR ne peut participer aux GAPP.
  • Dans un second temps, il est particulièrement intéressant de questionner les participants sur leurs représentations. Cela répond aux interrogations : sont-ils volontaires ou non? quelles sont leurs attentes, s’ils en ont ? quelles sont leurs représentations du psychologue (« le psy, c’est pour les fous ») ?. Cette étape est importante car nous avons peu de connaissance sur la manière dont les GAPP sont présentés en amont aux équipes.

Un intervenant au clair sur sa posture

Au cours de l’analyse de pratiques, la posture du psychologue est primordiale.

Il s’agira :

  • D’accepter de ne pas vraiment pouvoir anticiper le contenu de l’intervention.
  • De s’adapter au groupe. Ainsi qu’à ce qu’il apporte sur le moment au regard de ses besoins, de ses envies ou de ses encombrements.
  • De reformuler pour clarifier la compréhension. L’objectif est de limiter les interprétations, affiner l’implicite, sans craindre les nouvelles pistes de réflexions pouvant émerger de cette investigation.
  • De respecter un cadre tout en étant souple dans ce cadre. Ce jeu d’équilibriste va être important afin de créer un climat de confiance, préalable à la libération de la parole. Ainsi aucun participant ne se sentira jugé ni bridé.
  • De se faire confiance : affirmer sa posture d’écoute active est important. Nous ne pouvons « préparer » un groupe d’analyse de pratiques professionnelles car le support est amené sur le moment par le groupe. C’est notre posture qui va permettre de nous adapter à chaque sujet, à reformuler, questionner sans être dans une relation de « sachant ». La confiance que l’on a en notre capacité d’adaptation va nous permettre d’accepter l’inconnu afin de faire émerger le savoir via l’intelligence collective.

Les conditions d’une libération de la parole

Poser le cadre

Je reprends toujours avec les équipes le cadre de l’Analyse des Pratiques. J’insiste notamment sur la confidentialité des échanges : « rien ne doit sortir du groupe sans l’accord du groupe ». Je précise également la posture du psychologue qui se trouve plus dans le rôle d’animateur/modérateur des échanges que dans une position de transmission de savoirs (formateur).

Ceci me permet de préciser l’importance de la participation active de chacun, dans un cadre d’échanges borné (outre la confidentialité) par l’écoute respectueuse de chacun et le non-jugement des propos partagés. Je rappelle que le dialogue entre pairs, la « dispute professionnelle » peut notamment trouver sa place au cœur du collectif autour de discussions sur la qualité du travail, la cohérence des pratiques, …

Animer des analyses de pratiques professionnelles commence par un tour de table

Lors de la 1ère APP, je prends le temps de faire un tour de table. Chacun présente son parcours de formation et son expérience professionnelle. Je me présente également en conclusion. Cela détend l’atmosphère et apporte à chacun de nombreux éléments précieux pour mieux se connaître. Ces échanges nous permettent également d’observer les interactions au sein du groupe :observer les réactions/possibles tensions ou affinités, etc. et rendent également le psychologue plus accessible.

Se centrer sur la situation pour aborder la difficulté autrement.

Demander si l’un des participants souhaite s’essayer à l’exercice d’aborder une situation problème. J’ai remarqué que parler de « problème » peut parfois bloquer, du coup je parle aussi d’anecdotes, d’événements qui questionnent, qui dérangent. J’explique la manière dont je souhaite que soit présentée cette situation. Ce ne sont pas des transmissions. Il est important que tous les écoutants (qu’ils connaissent la situation ou non) soient immergés comme dans un film. Garder en tête une description détaillée type QQOQCCP par exemple : la personne situe le où ?, le quand ?, le quoi ? le comment ?, etc. en n’hésitant pas à y intégrer ses interrogations, ses ressentis, les émotions qui l’ont traversée à ce moment-là. Ainsi cela permet de respecter la parole de la personne tout en la guidant (surtout les premières fois) par des questions.

Comment libérer la parole pour animer des analyses de pratiques professionnelles?

Si personne ne trouve une situation, donner des exemples rencontrés au cours de votre pratique pour débloquer la parole. Pour les soignants d’EHPAD par exemple, décès d’un résident plus difficile que les autres à « digérer », les violences des résidents ou des familles ou entre collègues, violences sexuelles entre résidents. Un autre sujet souvent traité est la sensation de maltraitance envers les résidents ainsi que les difficultés de relation à certains résidents pour certains professionnels (femmes vs hommes, question de la couleur de peau/racisme/peur), etc.

Animer des analyses de pratiques professionnelles en se décentrant de la plainte institutionnelle.

Ne pas oublier que la plainte institutionnelle fera grandement partie des premiers échanges, notamment lorsque le climat social est difficile. Il me paraît important de laisser se déposer cette plainte. Celle-ci sera écoutée, canalisée tout en respectant le principe de l’APP. Ignorer cette plainte nous rend la tâche plus difficile. Le lien de confiance est plus compliqué à établir et il y a sans cesse « un éléphant au milieu de la pièce ». L’écouter diminue la tension du groupe et recentrer progressivement sur l’APP est contenant. Cela peut prendre plusieurs séances, c’est un jeu d’équilibriste et de patience.

Pour conclure, les bases posées en amont et au début de l’analyse de pratiques feront que votre intervention sera pérenne ou non dans le temps.

Des bases indispensables pour animer et pérenniser des analyses de pratiques

    • Si vous voyez l’analyse de pratiques en un processus en plusieurs phases, vous risquez de « perdre » certains participants qui ont besoin de s’exprimer dans ce cadre de « liberté », même si cela vous rassure. Dans ce cadre, des supervisions peuvent être intéressantes afin de travailler votre besoin de sécurité.

  • Créer une alliance avec les membres du CODIR permettra de donner du sens aux APP auprès d’acteurs parfois peu, voire pas du tout familiers de cette pratique et d’être « intégré » comme acteur indispensable de la QVCT de l’environnement.
  • Comprendre que les pratiques s’expriment dans un environnement de travail. Ainsi la plainte institutionnelle sera présente, il faut l’accueillir et pourquoi pas réinterroger son impact sur les pratiques de chacun.

Un article de Nadège Cordente  psychologue du travail à Bordeaux – Membre de Opyxis


Crédit photo: Image par wal_172619 de Pixabay

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