GAPP – Comment bien débuter !

Écrit par THIERRY MULIN le 2023-09-26.

Mes propos s’appuient sur une intervention dans une MAS qui accueille à Toulouse des personnes fortement handicapées, la plupart âgées. J’interviens depuis plusieurs années dans cet établissement pour animer des GAPP, mais pas avec les mêmes personnes. La séance a duré trois heures. Le groupe était composé de dix personnes, représentant différents métiers (aides-soignants, ergothérapeute, infirmière, lingère, factotum). Cette multi professionnalité est nouvelle pour ce GAPP et répond à une volonté concertée avec les RH.

Objectifs d’une première séance de GAPP

Poser le(s) cadre(s)
Mettre en confiance
Se présenter de façon positive et engageante
Permettre à chaque participant de prendre sa place

Bilan à chaud

De mon point de vue, cette première séance a été satisfaisante. Le tour de table de conclusion l’a confirmé. L’un des participants me semble bien résumer : « Au début, j’ai trouvé ça « chiant » et après ça m’a plu et intéressé ».

Ce début encourageant m’a donné envie de réfléchir sur ce que j’ai mis en place pour obtenir ce résultat. Ainsi nous pouvons partager cette expérience, voire engager un échange entre pairs, peut-être même une forme d’Intervision.

Les conditions d’un bon début de GAPP

Commencer à l’heure, même si tous les participants annoncés ne sont pas présents.
Vérifier que chaque participant soit « à l’aise » et laisser du temps pour ça. Par exemple, la température dans la pièce étant assez forte, j’ai rallumé des ventilateurs que j’avais éteints. En outre, une personne a changé de chaise, une autre s’est rapprochée d’un ventilateur.
Faire passer la feuille d’émargement et prévoir un ou des stylos à prêter.

Donner la parole

Poser des questions très simples permet de donner la parole au plus vite :

- Savez-vous ce qui nous réunit ?
- De quoi s’agit-il ?
- Avez-vous déjà participé à de tels groupes ?
- Comment vous sentez-vous au moment de débuter cet après-midi ?

Ces questions sont choisies pour une alternance. En premier lieu une question fermée, pour que chacun se positionne. Ensuite, une question ouverte, pour inviter chacun à s’exprimer. Bien sûr, le tout est à adapter au fur et à mesure des réactions, et du ressenti. A ce stade, il est important de susciter leurs propres questions. Surtout, essayons d’y répondre le plus clairement possible. En l’occurrence, seules trois personnes avaient déjà expérimenté ce type d’instances. Du coup, les questions ont été nombreuses, principalement portées par deux personnes. Inutile de chercher à ce stade à « traquer » ceux qui ne parlaient pas.

Se présenter

- J’avais préparé une présentation « ciblée »… inutile de tout délivrer en effet de son CV…
- J’ai notamment indiqué que j’intervenais depuis plusieurs années dans l’établissement et que j’avais donc croisé plusieurs de leurs collègues.
- J’ai donné quelques repères par rapport à ma formation (docteur en sciences de l’éducation et de la formation, spécialisé dans les métiers de l’accompagnement, notamment la formation d’adultes) en indiquant bien que je n’étais pas « psy »… d’une part parce que je ne le suis effectivement pas, d’autre part parce que j’ai observé que l’indiquer clairement peut lever certaines résistances… en imaginant que le relever quand on l’est porte aussi sa dimension positive.
- J’ai cité quelques étapes de mon parcours professionnel, notamment ancien instituteur et directeur d’association, mais aussi « tout jeune » retraité de l’enseignement supérieur.
- J’ai révélé enfin une forme de proximité empathique en indiquant que j’assurais régulièrement, le temps d’un week-end, la prise en charge de ma mère dont le profil correspond à certains des résidents dont ils prennent soin.

Présenter le dispositif GAPP

De façon générale, un groupe d’analyse des pratiques professionnelles (GAPP) invite au partage des difficultés quotidiennes de travail et vise à redonner du sens à l’activité professionnelle, au travers des démarches suivantes :

Reprendre les situations de travail, notamment celles qui ont pu poser problème, individuellement ou collectivement.
Interroger ses interventions et ses positionnements, ainsi que ses représentations et ses ressentis, en équipe de travail et vis-à-vis des usagers.
Étayer ses questionnements par l’observation, la réflexivité et l’analyse partagée de situations concrètes.
Dépasser ses incertitudes en construisant de nouvelles postures d’intervention, individuelles et collectives.

J’ai surtout défini mon rôle : « Mettre en confiance et entretenir une bonne dynamique de groupe qui permette l’expression et la réflexion sur le quotidien professionnel d’accompagnants, au quotidien, individuellement et collectivement ».

Poser le cadre « logistique » du GAPP

Préciser l’organisation

Vérifier ensemble les dates programmées.
Préciser la durée.
Rappeler comment s’est constitué le groupe, par le service RH, mais suite à une discussion qui faisait apparaître que la mixité professionnelle était non seulement possible mais pertinente.
La pause : un temps important de convivialité, en l’occurrence préparation d’un café à partager et distribution de bouteilles d’eau.

Poser le cadre éthique

Clarifier les règles du jeu dans le groupe.

Stabilité, ponctualité et régularité du groupe.
Confidentialité des échanges : comment ce qui sera partagé pourra « sortir » du groupe… ou pas…
Bienveillance et non jugement.
Vouvoiement/Tutoiement : en posture professionnelle, je vouvoie tout le monde et je m’en explique. Je ne le pose pas en « modèle » mais cette distance m’est utile. Ainsi, j’en pose le principe dès le départ. Cependant, j’accepte que dans certains contextes certains me tutoient spontanément… que je continue à vouvoyer.
Mémorisation rapide des prénoms… une reconnaissance précieuse de chacun pour chacun… je m’y implique.
Prise de notes en expliquant ce que j’allais en faire … pour éviter tout soupçon de dérogation à la confidentialité.
Annonce et présentation du « bilan à 4 mois ». Toujours dans le même esprit, c’est à dire ce que je pourrai remonter à la direction, de façon transparente pour le groupe. Bien entendu après évaluation par les participants eux-mêmes.

Inviter les participants à se présenter

Dans les groupes où les participants se connaissent, ce qui était le cas, je pratique la technique de « Qui présente qui ? ». L’un des participants se porte volontaire pour présenter un collègue qui en présente un autre. Ainsi de suite. Cet exercice met de l’ambiance, sur fond d’une légère appréhension. En conséquence, il peut générer des émotions, souvent positives à se stade. En effet, chacun se saisit de l’occasion d’exprimer tout le bien qu’il pense du/ de la collègue qu’il a « choisi.e » de présenter.
Je reprends ensuite cet échange en invitant à caractériser les informations produites en trois catégories. Nous distinguons opinions, faits et sentiments. Notre travail d’investigation réflexive commencera en effet, souvent, par chercher derrière chaque opinion émise, toujours discutable, l’opinion qui a été reprise ou les faits, voire les ressentis qui l’ont établie.

Poser le cadre « méthodologique » du GAPP

Préparer la suite

La première des questions se résume par « De quoi allons-nous parler dans ce groupe ? »

Deux thématiques se sont dégagées. D’une part une thématique plus générale, de l’autre un questionnement plus ciblé sur une résidente. Cependant les deux étaient liés. En premier lieu, la question des douches puis l’agressivité d’une résidente au moment d’en prendre une.

A ce stade, je me suis contenté d’écouter et de reformuler. De fait, je me suis appuyé sur les échanges pour illustrer les points saillants du fonctionnement du GAPP. J’ai pu observer la participation était partagée et dynamique. Toutefois, deux personnes se sont montrées plus en retrait dans les échanges.

Établir un premier bilan « à chaud »

Tour de table à partir de la question la plus ouverte : « comment vous avez vécu cet après-midi ?

Pour conclure “Comment bien débuter un GAPP”

Donner des repères aux participants pour qu’ils sachent à quoi ils sont conviés, surtout si peu d’infos ont été données par l’établissement.

Donner une image positive de l’intervention… et de l’intervenant.

Trouver des moyens engageants pour qu’ils prennent la parole, chacun à leur tour, le cas échéant en n’hésitant pas à être directif, afin qu’ils prennent leur place.

Se préparer, pour le prochain RDV, à reprendre… au début… chaque séance de GAPP est unique… et rarement la suite du précédent.