Le protocole en Analyse des Pratiques Professionnelles- Vidéo
Aujourd’hui, on reparle d’analyse des pratiques professionnelles et on va voir ensemble ce que c’est que le protocole.
Alors, pourquoi un protocole d’analyse des pratiques professionnelles?
Bien pour organiser la parole des participants. En effet, dans les réunions de travail classiques, lorsqu’une équipe se rencontre, quand l’une des personnes de l’équipe a un problème ou présente une situation dans laquelle elle est mise en difficulté, ce qui se passe généralement, c’est que les autres ne tardent pas à réagir spontanément en amenant des éléments:
- soit de leur propre expérience,
- soit de leur propre vécu,
- soit des conseils ou des idées possibles, des solutions possibles.
Or, la personne, lorsqu’elle commence à présenter sa situation, n’a pas forcément les idées complètement claires sur ce qui se passe. Et elle n’a pas forcément pris conscience de tous les maux, de tous les leviers, de toutes les causes véritables en fait, de cette situation. Donc, lui amener des éléments d’expérience tout de suite, lui amener des solutions tout de suite, peut parasiter complètement sa réflexion, peut la faire même entrer en défense, se dire ah non, non, mais ce n’est pas ça, mais ce n’est pas tout à fait ça. Bref, on va avoir du mal à solutionner la question qui est amenée par cette personne.
Il existe d’autres, donc un autre moyen d’accompagner et d’aider qui est à mon sens beaucoup plus efficace et en tout cas, qui fait ses preuves depuis longtemps. C’est le protocole d’analyse des pratiques professionnelles. Dans ce protocole, on va donc permettre à chaque participant toujours d’amener sa motivation à aider la personne de l’équipe, mais d’une manière qui est un peu plus disciplinée.
Alors, comment ça marche?
On va découper le temps de l’analyse des pratiques professionnelles à proprement parler en trois parties principales.
La phase de narration
La première partie s’appelle la narration, c’est à dire que pendant cette phase qui va durer environ cinq minutes, cinq minutes pleines, c’est un bon temps déjà puisque dans la vie de tous les jours, on n’a pas le temps de parler d’une problématique au moins pendant cinq minutes avant qu’on soit interrompu. Et la personne qui présente sa situation va nous parler de ce qui lui pose question, de ce qui lui pose problème. Elle va nous présenter les éléments de la situation et tout le reste du groupe écoute sans interrompre.
Ensuite vient un deuxième temps qu’on appelle le temps de l’élucidation.
La phase d’élucidation
Élucider pourquoi? Eh bien, pour la question, la notion d’approfondir la situation. L’objectif, ça va être de rester pendant 30, 40 minutes avec le problème. Et ça, c’est un petit peu à l’inverse de nos habitudes. Quand il y a un problème qui est présenté, on a plutôt tendance à vouloir vite se rassurer, à trouver une solution, alors que là, on va rester un peu plus longtemps avec le problème. Et cette phase est clé.
L’élucidation va permettre à la personne qui travaille sa situation de la questionner, d’approfondir sa compréhension de son problème, d’approfondir sa connaissance de son problème grâce aux questions. Alors, on va essayer de poser des questions majoritairement ouvertes. Je souris parce que c’est plus difficile au départ de poser des questions ouvertes du type:
- “Qu’est ce que commencer pour toi?”,
- “Qu’est ce que tu veux dire quand tu dis ta tata?”,
- ” Que est ce que t’as fait si ou est ce que t’as essayé ça?”,
- “Est ce que ce serait pas ci ou est ce que ce serait pas ça?”, “
Qui sont donc des questions fermées qui appellent une réponse?” Oui, non.
Bref, pendant cette deuxième phase d’élucidation, le groupe va questionner la problématique et grâce aux questions et à la façon finalement différentes dont elles sont posées en fonction du point de vue de la sensibilité de chacun des participants, eh bien, ça va éclairer pour la personne qui travaille la situation, le narrateur. Ca va éclairer cette situation sous de nouveaux jours et ça va lui permettre de comprendre un peu plus ce qui se passe, d’approfondir son degré de conscience des éléments de cette problématique.
Je conseille aussi souvent aux participants, dans cette phase numéro 2, de faire des reformulations, c’est à dire de redire à la personne qui présente la situation ce qu’on a compris de ce qu’elle dit, ce qu’on a compris, de ce qu’elle vit. Ça permet généralement d’abord de se sentir compris pour la personne qui parle. On se dit Ah ben oui, je me sens écouté, je me sens compris, ce qui incite encore plus à la parole. Mais aussi, ça provoque des effets miroirs. C’est là qu’on se ré entend dire des choses qu’on a dites soi qu’on s’était entendu dire comme ça ou soit qui nous font prendre conscience de l’importance de ce qu’on vient de dire.
Voilà pour la phase numéro 2. Cette phase numéro deux est la phase la plus longue en proportion dans le temps d’analyse des pratiques professionnelles. On essaye donc de se centrer au maximum sur le ou la narratrice.
la phase de subjectivité individuelle
Ensuite vient la phase numéro 3, qu’on appelle la phase de subjectivité individuelle dans cette phase. On va inviter chacun des participants à se projeter dans la situation en disant “Moi” si j’étais dans cette situation, voilà ce que je vivrais, voilà ce que ça me ferait ressentir, et voilà ce que je ferais ou ce que j’essayerai de faire. Dans cette phase on essaye de d’enrichir la connaissance du narrateur de sa situation grâce à la multi référentielle du groupe. Chacun ayant ses propres valeurs, ses propres vécus, sa propre expérience professionnelle, il va pouvoir en faire bénéficier au narrateur comme une potentielle source d’inspiration.
Donc, tout le groupe va se prêter au jeu et chacun, l’un après l’autre, va exprimer sa projection. Qu’est ce qu’il ferait dans telle ou telle situation? Bien entendu, le narrateur ou la narratrice a un droit de non-réponses. Il n’est pas du tout tenu de dire ce qu’il lui plaît ou ce qui lui déplaît. En gros, il peut faire son marché parmi les vécu et les solutions proposées par les différents participants.
Enfin, une fois qu’on a terminé ce temps numéro trois qui dure en fonction de la taille du groupe une quinzaine à une vingtaine de minutes, on en revient au narrateur pour lui demander comment il a vécu ce temps d’analyse de pratiques. Comment c’était pour lui et ce qu’il a repéré, des choses marquantes dans l’accompagnement du groupe. Et puis, ce qu’il en retient que finalement. Qu’est ce qui ressort pour lui dans sa situation? Encore une fois, le narrateur n’est pas obligé de répondre sur le contenu, nous faire une restitution ou une synthèse de tout ce qu’il a compris de sa situation. Mais généralement, dans l’expression spontanée, on a des choses comme :
- J’y vois plus clair.
- Je me rends compte de quel le vrai problème
- Du coup, je sais ce que je vais pouvoir faire en sortant de la salle
- à vos idées, je n’avais pas pensé à ci ou je n’avais pas pensé à ça.
Bref, on a un retour un peu à chaud, des éléments de compréhension nouveaux qui se sont dégagés pendant le temps d’analyse de pratiques.
Voilà pour les étapes classiques du Protocole d’analyse des pratiques professionnelles.
Grâce à ces différentes étapes, donc, la parole du groupe est un peu disciplinée et les participants savent à tout moment comment ils peuvent mettre à profit leur énergie et leur bonne volonté, leur envie de bien faire pour accompagner au mieux la personne qui travaille sa situation. Il existe des variantes en termes de protocole, et notamment une variante que j’aime beaucoup et que j’utilise lorsque j’ai le temps et lorsque le groupe est suffisamment mature pour le faire. On appelle cette méthode le GEASE pour Groupe d’entraînement et d’analyse de situation éducative.
Le GEASE ou Groupe d’entraînement et d’analyse de situation éducative
Ce protocole a été créé par des universitaires au départ pour la formation continue des professeurs. Je l’ai adapté pour qu’il soit utilisable dans n’importe quel environnement, dans n’importe quelle institution. Et pour moi, il fait beaucoup, il a montré vraiment ses preuves en termes de progression du groupe lui même dans sa façon de s’accompagner. Le Groupe d’entraînement, d’analyse de situation éducative ajoute aux différentes étapes qu’on a déjà vues la narration, l’élucidation et les subjectivités individuelles. Trois étapes un peu formelle, de retour de méta analyse, en quelque sorte, dont le retour au narrateur qu’on le fait en analyse des pratiques professionnelles classiques. Mais là où on va demander au narrateur ce qu’il a aussi observé du fonctionnement du groupe dans sa façon d’être accompagné, comment il s’est senti à différents moments, à différentes questions. Et puis, évidemment, son retour sur la situation, sur ce qui est ce qu’il a avancé.
Ce partage permet ensuite de donner la parole à l’observateur qui ait un rôle particulier qui n’existe qu’en GEASE à l’observateur. Son rôle, c’est donc d’observer et qu’est ce qu’il observe? Il observe le groupe au travail pendant la phase d’élucidation. Il n’intervient pas et ne pose pas de questions. Il ne fait pas de reformulation. Il ne fait qu’observer ce qui se trame, ce qui se vit dans le groupe et donc dans la phase numéro 5. Le retour à l’observateur, c’est son temps de parole où il va nous restituer ce qu’il a observé du groupe au travail, et puis de qu’il a observé de l’évolution de la situation, du point de compréhension a au départ aux points de compréhension X, Y ou Z à la fin du temps d’analyse de pratiques.
Enfin, il y a une dernière phase, la sixième étape qui s’appelle le retour aux participants, où chacun est invité à s’exprimer sur la double dimension. Qu’est ce que j’ai vécu dans ce temps d’APP? Comment c’était pour moi, en fait? Comment je me suis senti? Qu’est ce que j’ai repéré qui s’est passé soit pour moi, soit pour les autres participants, soit pour le narrateur? Et aussi, qu’est ce que j’en retire en termes d’apprentissage, par rapport à la situation ou par rapport à une situation qui fait résonance aujourd’hui?
L’animateur, enfin, termine avec lui aussi en participant à ce tour, en amenant des éléments d’observation sur le fonctionnement du groupe et sur la situation elle même. Cela permet finalement une sorte de double effet “Kiss Cool”. Non seulement on a travaillé la situation qui était amenée par le participant, par le narrateur ou la narratrice, mais on a travaillé aussi sur la façon dont le groupe a aidé le participant à travailler sa situation. Ça fait donc une sorte de formation de chaque participant à pratiquer de mieux en mieux l’analyse des pratiques professionnelles.
Cette vidéo est maintenant terminée. Je vous remercie beaucoup de l’avoir suivi. Si vous avez appris quelque chose ou si vous avez aimé cette vidéo, n’hésitez pas à mettre un petit pouces bleu. N’hésitez pas non plus à vous abonner à Ma Chaîne. Je posterai deux futures vidéos qui parleront d’analyse des pratiques professionnelles, mais aussi d’autres sujets liés à l’écoute, dans l’environnement professionnel ou à l’écoute avec les particuliers. Merci beaucoup. À très bientôt, je vous retrouve dans une prochaine vidéo où on parlera du cadre d’analyse des pratiques professionnelles.Au revoir !
Florent Berthéas – Intervenant en analyse des pratiques, Formateur, Psychopraticien – Lyon
Groupe d'entraînement et d'analyse de situation éducative, Protocole