Qu’est-ce qu’un GAP de type Balint
tel que je le pratique ?
C’est un groupe d’inspiration Balint, se réunissant en général une fois par mois, dans un cadre contractuel. Il est animé par un professionnel, en général passé par l’analyse, en tout cas formé et capable d’ouvrir le questionnement et de favoriser l’émergence d’un espace où les praticiens du champ social, éducatif, psychologique, de la santé, et de tout métier de la relation humaine puissent s’appuyer sur leurs sentiments et émotions pour mieux exercer leur métier, et penser par eux-mêmes leurs pratiques.
En France, ce dispositif a d’abord été pratiqué auprès d’éducateurs spécialisés accompagnant quotidiennement des enfants, des ado, des adultes. Il est maintenant largement répandu dans les autres secteurs.
- Le GAP type Balint est un groupe constitué autour d’un cadre à référence clinique et d’une méthodologie précise découlant de ce cadre ;
- L’objectif général du groupe est de soutenir des professionnels en relation avec des publics fragiles, souvent sujets à des pulsions d’agressivité et présentant des troubles associés à de graves difficultés sociales, familiales, voire des symptomatologies lourdes, ou des manifestations de destructuration ;
- À partir de l’exposé d’une situation professionnelle concrète vécue par l’un des participants, le groupe travaille collectivement à l’analyse de cette situation. L’animateur, garant du cadre qui favorise les associations libres des participants, veille au maintien d’une écoute bienveillante, confidentielle, sans jugement, et d’une coopération authentique ;
- L’objectif d’une séance est de comprendre en profondeur la situation professionnelle exposée, les émotions qu’elle suscite chez l’exposant, en questionnant ses liens avec :
– Ce qui appartient au praticien et ce qui appartient à l’autre dans les affects éprouvés, – Les représentations que le professionnel a de lui même en tant que professionnel et celles qu’il a de la personne dont il s’occupe – l’histoire professionnelle de l’exposant et les parts de sa personnalité professionnelle impliquées, – le dispositif qu’il adopte, – les effets émotionnels et imaginaires du récit du cas sur le groupe, et ce qui se transfère du terrain sur le groupe, lequel fait un travail de contenance psychique des éléments issus du terrain ; – éventuellement, la réaction personnelle aux éléments de souffrance invalidants en lien avec les dispositifs institutionnels ou groupaux qui peuvent entraver la capacité professionnelle et la vie psychique du praticien.
Analyser sa pratique, participer à un GAP type Balint, c’est :
- Examiner son implication personnelle dans les situations professionnelles rencontrées et travailler à la co-construction du sens de sa pratique. Il s’agit de démonter ensemble le processus qui s’est joué, les ratées éventuelles à l’intérieur du processus, les niveaux d’achoppement (conscient, inconscient, méthodologiques, relationnels, systémiques…) .
- Repérer des répétitions de fonctionnements et des analogies dans les situations.
- Ne plus rester seul devant les difficultés, s’apercevoir que les autres ont aussi des difficultés, et que celui qui les expose ne se fait pas disqualifier, mais au contraire est reconnu en tant que professionnel
- faire ainsi chuter « l’oscillation diabolique entre impuissance et toute puissance » (Georges Gaillaird)
- se changer (faire bouger sa personnalité professionnelle) pour aider au changement de l’autre dont on s’occupe.
Les participants parlent souvent spontanément :
- de ce qu’ils font et dont ils ne parlent pas d’habitude parce que ça ne correspond pas forcément à ce qui est prescrit,
- de ce qu’ils souhaiteraient faire et qu’ils n’arrivent pas à faire ;
- de ce qu’ils font et qu’ils aimeraient ne pas faire ou
- de ce qu’ils font sans vraiment avoir conscience qu’ils le font, soit qu’il est plus confortable de ne pas le savoir, soit que cet agir est tellement “incorporé” qu’ils ne le voient plus du tout comme modalité de leur action.
Pour les professionnels, il découle de leur participation à un GAP type Balint:
- un sentiment de pacification et une meilleure canalisation de l’énergie,
- un plus juste positionnement dans la relation,
- une meilleure acceptation des limites inhérentes à leur rôle et à leur action professionnelle,
- une meilleure tolérance de la conflictualité, ce dont bénéficie l’institution,
- une diminution de la fatigue au travail par un déblocage de leur potentiel personnel créatif,
- une confiance accrue dans leurs capacités à accompagner des publics difficiles et une capacité accrue à être et faire avec l’incertitude
- une motivation à développer seul et en équipe une position réflexive sur leur pratique, leur implication personnelle dans les situations professionnelles rencontrées. leur identité professionnelle, leurs ressentis.
- Une capacité à repérer et à se protéger des dysfonctionnements institutionnels.
Mon expérience m’a permis de mesurer l’importance de la cohérence des positionnements des professionnels pluridisciplinaires autour d’une même situation problématique, ce qui me conduit à proposer en intra des GAP les rassemblant. Ce dispositif limite le morcellement des interventions et produit une analyse commune des données.
Les professionnels de terrain rencontrent régulièrement des sujets présentant des troubles psychologiques, des difficultés de cohérence, voire des déstructurations profondes qui les font souffrir et qui impactent l’institution.
Ces troubles associés à de graves difficultés sociales, familiales et souvent à des pratiques addictives accroissent la complexité des suivis et posent question.
Le GAP type Balint présente un point d’appui solide aux professionnels, tant pour interroger et élaborer ce qu’ils engagent d’eux dans leur pratique professionnelle, que pour leur fournir des éléments leur permettant de repérer leur relation à l’institution, de se dépêtrer dans ses dysfonctionnements, voire d’être acteur dans de nouvelles dynamiques institutionnelles.